Les Arbres Qui N’ont Pas Survécu
- David Jr

- 5 juin
- 4 min de lecture
Nous avons planté des milliers d’arbres dans le cadre de ce projet forestier, mais beaucoup (la majorité !) sont morts. Sur une période de dix ans, j’estime que plus de la moitié des arbres que nous avons plantés intentionnellement ne survivent pas plus de deux ou trois ans.
Que leur arrive-t-il ? Et plus important encore : est-ce grave ?
D’après nos observations, voici les principaux responsables de ces pertes :
Souris – Rongent l’écorce à la base
Chevreuils – Mangent l’écorce, les jeunes feuilles, et frottent leurs bois contre les tiges
Sécheresse – Surtout lors du premier printemps, quand les racines sont encore peu développées ; l’arrosage n’est pas viable à grande échelle et crée de mauvaises habitudes 🙂
Maladies – Comme la chalarose (dépérissement du frêne) qui touche les arbres vulnérables ou affaiblis
Mauvais choix d’emplacement – Planter dans des zones trop chaudes, trop froides, trop humides, ou avec un pH de sol inadapté
Concurrence – Avec d’autres plantes comme les ronces ou les roseaux

Les trois grands arbres traditionnels de cette partie de l’Europe (la Normandie) étaient l’orme, le frêne et le chêne. Aujourd’hui, seuls les chênes subsistent en tant que géants forestiers.
Brève histoire des ormes
J’ai commencé à planter ici il y a presque 40 ans. À cette époque, la graphiose de l’orme (un champignon transmis par des coléoptères) avait déjà décimé les ormes adultes de la région. La maladie a frappé à la fin des années 1960, avec des effets dévastateurs.
Quand j’ai commencé à planter à la fin des années 1980, les ormes avaient déjà disparu. Les souches restaient comme témoins silencieux, et certaines sont encore visibles le long du chemin de Caperdu.
Cependant, les racines de ces géants sont restées actives et émettent des rejets. Nous avons donc un bon nombre de jeunes ormes de taille modeste, qui vivent jusqu’à une trentaine d’années - juste assez pour produire des graines, bien que je n’aie jamais observé de germination. Ces rejets peuvent être transplantés et atteignent un diamètre d’environ 15 cm, avant d’être à nouveau touchés par la maladie. Ces troncs donnent un bois très solide ; l’orme est un bois dur et résistant.
Brève histoire des frênes
Pendant un temps, environ la moitié des arbres que je plantais étaient des frênes. C’est une espèce qui se transplante facilement et pousse vite. Mais depuis 2006 environ, la chalarose s’est propagée et a tué la majorité des jeunes arbres, laissant les plus vieux en mauvais état.
Certains individus montrent une résistance, et peut-être qu’une forme plus robuste émergera, mais nous avons très peu de jeunes frênes en bonne santé.
Des recherches récentes suggèrent que les frênes sont peut-être plus résistants que prévu. Un tiers mourraient, un tiers étaient malades, et un tiers pourraient survivre - cela correspond à ce que j’ai observé sur le terrain.
Brève histoire des chênes
Avec la disparition des ormes et des frênes, le chêne est devenu le grand arbre dominant ici. Nous avons la chance d’en avoir beaucoup. Un chêne adulte (plus d’un mètre de diamètre, environ 300 ans) est considéré comme “ancien”, et nous en avons environ soixante.
Dans de bonnes conditions, presque tous les glands sains germent. Par un automne chaud et humide, le chemin de Caperdu est couvert de glands déjà en germination. Notre méthode préférée de plantation est simple : la technique du “chop and drop”. On ouvre un trou avec un outil tranchant ou une bêche étroite, assez profond pour décourager les souris, on y dépose le gland (ou autre graine), puis on rebouche avec le pied. Un seul agent peut planter une centaine de glands par heure.
Transplantation
Certains arbres, comme le chêne, ont un système racinaire qui ne récupère jamais complètement après transplantation. Par exemple, un jeune chêne de deux ans a déjà développé une racine pivotante irremplaçable. Il peut survivre s’il est transplanté, mais sans cette racine, il sera toujours affaibli. Il pourra vivre plusieurs années, mais il ne sera jamais bien enraciné, et tombera lors d’une tempête.
Bouturage
Certains arbres poussent facilement à partir d’une simple bouture insérée dans un sol humide. Cela se fait généralement à l’automne, quand les feuilles sont tombées. Les saules, les osiers et les peupliers prennent bien racine de cette manière. Nous les considérons en partie comme sacrificiels : certains sont mangés par les chevreuils, d’autres ne prennent pas racine. Mais certains s’enracinent et deviennent adultes, même s’ils restent des arbres à vie courte (environ 30 ans).
Conclusion
Nous adaptons nos efforts de protection à l’investissement consenti pour planter chaque arbre. Les glands sont plantés de manière simple et sans suivi, tandis que les jeunes plants achetés (environ 1 mètre de haut) reçoivent des protections individuelles. Contrairement à de nombreux projets de reforestation, notre approche n’est pas ponctuelle : c’est un processus continu sur de nombreuses années.
Cela nous rend plus résilients face aux pertes individuelles et nous permet d’apprendre de nos erreurs ou de la malchance. Malgré les pertes, chaque arbre a joué un rôle - nourrir la faune, façonner le sol, ou simplement nous montrer ce qui ne fonctionne pas.







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